lundi 8 février 2010

L’oracle de Davos


Depuis près de quarante ans, le Forum économique mondial qui vient de se terminer, est le rendez-vous des grands décideurs du monde.

Rappelons ce qu’est le « World Economic Forum » : cette fondation à but non lucratif dont le siège est à Genève a été créé en 1971 par Klaus M. Schwab, professeur d’économie en Suisse. Elle réunit chaque année à Davos, en Suisse, des dirigeants d’entreprise, des responsables politiques du monde entier ainsi que des intellectuels et des journalistes, afin de débattre des problèmes les plus urgents de la planète. Le Forum organise également la « Réunion annuelle des nouveaux champions » en Chine et plusieurs réunions régionales qui se tiennent tout au long de l’année.

Qui est le discret Klaus Schwab ? Moins libéral qu’on ne le dit, il a déclaré récemment : « J’ai créé le forum il y quarante ans pour que les PDG rencontrent la société civile mais au fil des ans, leurs politiques de rémunérations ont rapproché les PDG des actionnaires et, parallèlement, les actionnaires sont devenus court-termistes. Il faut reconstituer un ethos professionnel » A Genève, la Fondation Schwab est, à côté de celle d'Ashoka et d'Accumen aux Etats-Unis, l'une des plus grandes institutions apportant son soutien aux entrepreneurs sociaux. Sa rencontre avec Muhammad Yunus a été déterminante.

L[ongtemps considéré comme la Mecque de la « mondialisation heureuse », le forum serait –il en passe de devenir selon la formule hégélienne « la conscience malheureuse du monde » ?

Depuis que la crise mondiale s’est déclenchée, un nouveau « prophète » y est fort écouté : Nouriel Roubini.

Né à Istanbul dans une famille de Juifs iraniens, il a vécu une enfance nomade : en Iran, en Israël et en Italie. Il a étudié l’économie à Harvard aux États-Unis, où il a complété son doctorat en sciences économiques en 1988. Selon son superviseur, Jeffrey Sachs, il a le talent inhabituel de comprendre les institutions économiques de façon mathématique et intuitive.

Après avoir enseigné à Yale, il fut nommé économiste senior aux Affaires internationales pour le compte du Council of Economic Advisers, organisation chargée de conseiller le président des États-Unis.

Dans les années 1990, Roubini a étudié l'effondrement des économies émergentes. Il est arrivé à la conclusion qu'un commun dénominateur était la cause de ces effondrements : les pays finançaient la balance courante par des prêts effectués à l'étranger. Il a prédit que les États-Unis serait probablement le prochain pays à subir un tel choc : en 2004, il a commencé à exposer ses théories à propos d'un tel effondrement.

Surnommé « Dr. Doom « ou « Docteur Catastrophe » à cause de ces prédictions économiques pessimistes qui contrastaient avec celles de la plupart des économistes,il affirma,en 2005 , dans la revue Fortune, que le « prix des maisons surfait sur une vague spéculative qui coulerait bientôt l'économie ».

En 2007, à Davos, il annonça seul contre tous que l’économie américaine connaîtrait « un atterrissage difficile ».Le choc dans l’immobilier ne viendra que sept mois plus tard…

« On dit souvent que lorsque l’économie américaine éternue, le reste du monde attrape un rhume. Le problème, c’est qu’aujourd’hui, les Etats-Unis ont une pneumonie! » déclara-t-il en 2008.

« Une décennie d'idéologie de l'autorégulation des établissements financiers qui a fait son temps », résume Nouriel Roubini.

A Davos, en 2010, il affirme que le maillon faible était désormais non plus les pays émergents, comme lors de la crise Téquila, mais les pays riches, en particulier ceux qu’il appelle les membres Club Med de la zone euro : Italie, Espagne, Grèce, Portugal … Les évènements en Grèce et au Portugal semblent pour le moment lui donner encore raison. Le problème dans ce type d’exercice, est que la prévision - prédiction devient souvent une cause de la spéculation…

Le pire n’étant pas toujours sûr, la suite des événements confirmera-t-elle les sombres prédictions de ce Cassandre de l’économie ? Tout va dépendre de l’attitude des gouvernements et des autorités monétaires.

En conclusion, pour bien comprendre l’économie actuelle, il ne suffit pas de se baser sur des modèles théoriques de plus en plus complexes. Il faut aussi s’appuyer sur des analyses psycho–sociologiques, comme le font les « nouveaux économistes » tel Elyes Jouini de la Chaire Groupama à Dauphine qui a un profil très similaire à Nouriel Roubini. En outre, une grande expérience internationale semble requise pour bien comprendre et analyser l’économie « globale ».

Finalement à quand un Davos des Mutualistes pour réfléchir à ces questions ?

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